Question sur le référé suspensif en cas de révocation (discipline)

QE n°573 du 10 juillet 2012 de Mme Marie-Jo Zimmermann à M. le ministre de l’intérieur.

J.O. A.N. (Q), n°36, 11 septembre 2012, p. 5018.

 

Dans le cadre d’un recours en référé, le juge peut prononcer la suspension de la décision de révocation d’un agent, ce qui a pour conséquence d’obliger la collectivité à réintégrer l’agent jusqu’au jugement statuant sur le fond, de lui verser son traitement et de suspendre le versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (Conseil d’Etat du 21 décembre 2001, req. n°237774). Cette décision n’a pas forcément pour effet de contraindre l’agent à rembourser les sommes perçues, le juge pouvant moduler dans le temps les effets de sa décision en décidant qu’elle ne prendra effet qu’à une date ultérieure (Conseil d’Etat du 11 mai 2004, req. n°255886).

 

Question

Mme Marie-Jo Zimmermann rappelle à M. le ministre de l’intérieur le cas où un maire a prononcé la révocation de deux agents municipaux et où ceux-ci ont accepté de bénéficier des indemnités de chômage, conformément à l’arrêté ministériel du 30 mars 2009. Ainsi, pendant un an et demi, les intéressés ont perçu 93 % de leur salaire. Elle lui demande si une saisine ultérieure du tribunal administratif par l’intermédiaire d’un référé peut remettre en cause l’arrêté municipal de révocation.

 

Réponse

Le droit au versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi est ouvert aux agents publics dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités qu’aux agents du secteur privé conformément à l’article L.5424-1 du Code du travail. En application de l’article L.5422-1 du même code, ont droit à l’allocation d’aide au retour à l’emploi les travailleurs involontairement privés d’emploi, aptes au travail, recherchant un emploi et qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure. Le Conseil d’Etat, dans un arrêt n° 96359 du 9 octobre 1992, a considéré que la révocation d’un fonctionnaire était un cas de privation involontaire d’emploi. Par conséquent, sous réserve qu’il remplisse toutes les conditions, un agent territorial révoqué a droit à percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi. Dans le secteur privé, de la même manière, les salariés licenciés pour faute ont également droit au versement du revenu de remplacement du chômage, puisque la réglementation applicable ne prévoit pas de dérogation pour ce type de licenciement. S’agissant d’une éventuelle requête en référé dirigée contre un arrêté municipal de révocation, il convient de rappeler que le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire et n’est pas saisi du principal (article L511-1 du Code de justice administrative). Il n’a donc pas vocation à se prononcer sur l’annulation de l’acte mais peut prononcer sa suspension, notamment dans le cadre de l’article L521-1 du Code de justice administrative, qui exige pour cela trois conditions cumulatives : il faut qu’une situation d’urgence soit caractérisée, qu’un moyen soit de nature à créer, en l’état de l’instruction du dossier, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée et enfin, qu’une requête en annulation ait été déposée. Une mesure de suspension, par le juge des référés, de l’arrêté de révocation, emporterait obligation de réintégration de l’agent jusqu’au jugement statuant au fond (CE, 21/12/2001, req. n° 237774). Par conséquent, le versement des allocations de chômage serait suspendu dans la mesure où le fonctionnaire percevrait de nouveau son traitement. Cette décision de suspension ne saurait cependant avoir pour effet de contraindre l’agent au remboursement des sommes perçues jusque-là. En effet, dans l’hypothèse même où le juge du fond prononce l’annulation d’un acte administratif, il peut prendre en considération les conséquences de la rétroactivité de l’annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence, et donc moduler dans le temps les incidences de la décision d’annulation, en décidant par exemple qu’elle ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine (CE, 11/05/2004, req. n° 255886).